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lundi 9 mars 2015

Professeur Jean-Claude Marut, chercheur, spécialiste de la question casamançaise sur le rôle de la diplomatie américaine dans la crise casamançaise depuis 25 ans.




Le départ du conseiller spécial américain pour la Casamance en novembre est relativement passé inaperçu. Par la suite, son poste a été supprimé. Ce qui a mis fin à deux ans de ce que les américains ont appelé une diplomatie expéditionnaire dont l’objectif était d’appuyer le processus de paix gouvernemental inauguré par le président Macky Sall en 2012. Avec de la part des américains une volonté de booster cette procédure pour hâter si possible la fin du conflit.
Nous sommes dans une configuration opposée à celle du Sud-soudan où les américains étaient intervenu pour appuyer le mouvement sécessionniste et ce fut efficace puisque ce dernier a triomphé.

Le départ du conseiller n’est probablement pas un échec dans la mesure où cette expérience était par définition limitée dans le temps. Peut-être que ce départ a été prématuré parce quelque chose n’a sûrement pas marché. Ce qui ne veut pas dire que les américains ne s’intéressent plus au conflit casamançais, vu qu’ils s’y intéressent depuis une quinzaine d’années. Ils continueront à s’y intéresser même à la fin du conflit.
Il a sans doute été difficile de parvenir rapidement à un accord de paix. Comme en témoigne d’ailleurs plusieurs allusions à des communiqués ou d’interviews aussi bien des conseillers américains que de l’ambassade où ils font état de lenteur. 

L’implication américaine pose trois questions. Premièrement, comment se fait-il que les américains s’intéressent à un si petit conflit à basse intensité sans enjeu majeur pour les Etats-Unis dans un pays ami, traditionnellement lié à la France et aux Etats-Unis et qui n’a jamais été menacé sérieusement par le conflit séparatiste. On peut considérer que l’Etat sénégalais, de concert avec son armée contrôle la situation même si y a eu des moments chauds et des moments difficiles. Donc, on peut valablement se demander ce qui motive les américains dans ce conflit.

Deuxièmement, il est bon de se demander comment ils s’impliquent dans ce conflit, les étapes et les formes de cette implication.
Et enfin quels sont les obstacles qu’ils rencontrent et qui font que le règlement du conflit tarde à se matérialiser.

Il ne semble pas que les américains aient des intérêts économiques en Casamance. Il n’y a pas de pétrole qui pourrait les intéresser à part un petit gisement offshore non rentable. Les américains se satisfont de plus en plus du Gaz de schiste. Il n’y a pas de matière première qui les intéresse particulièrement, manifestement, pas d’investissement américain dans cette zone. Seul le projet d’une zone franche existe en ma connaissance. Il a été annoncé par Macky Sall lors de sa visite à Washington.

Les américains ne sont en Casamance que pour des raisons stratégiques. Pas forcément dans la Casamance elle-même mais du fait que la Casamance de par sa situation est un carrefour d’influence à la frontière de plusieurs pays. Et parce que la Casamance appartient au Sénégal qui est lui-même intéresse les américains à cause de sa position géographique.

Pour bien comprendre le conflit Casamançais, il faut le placer dans une perspective plus globale, à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest, du Sahel et de l’Afrique toute entière. Depuis quelques années, les américains ont fait du continent leur priorité. Après la guerre froide, les américains ne s’y intéressaient plus mais avec les attentats du 11 septembre 2001, ils ont recommencé à avoir un intérêt nettement plus important à l’Afrique. 

La stratégie américaine dans le continent vise à contenir la menace terroriste. Elle s’est concrétisée par la création en 2007 du commandement militaire américain pour l’Afrique localisé à Stuttgart en Allemagne. Le Sénégal a été l’un des premiers pays à intégrer les organismes de défense du continent africain mis en place par les américains. 

Ce mécanisme a amplifié un mouvement qui existait déjà à savoir la formation d’officiers militaires sénégalais aux Etats-Unis ou l’envoi de conseillers militaires américains au Sénégal pour améliorer la formation des militaires sénégalais.

Dans le même temps, l’armée sénégalaise a reçu du matériel américain destiné à des opérations de maintien de paix étant bien entendu que l’armée sénégalaise a aussi utilisé ce matériel en Casamance.   

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